Fin novembre 2023, je vous avait raconté mon passage en garde à vue. Plus d’une année après, le verdict est tombé. Nous sommes toutes les trois acquittées !

Je ne vous cache pas notre soulagement et ce bref regain d’espoir dans nos institutions judiciaires. En plus de légitimer nos actions, le juge dénonce l’abus dont a fait preuve le procureur en nous emprisonnant pendant 28 h.

# Le communiqué de presse

# Trois activistes acquitté·e·s après une action de jet de peinture sur l’UBS

Victoire de taille pour la justice climatique – dans son verdict du 30 janvier 2025, le tribunal de police du canton de Genève note que la manifestation non autorisée des activistes de Renovate Switzerland menée le 20 novembre 2023 à Genève était protégée par la liberté de réunion et par conséquent pas punissable.

  • Les trois activistes climatiques avaient participé à une action de désobéissance civile au cours de laquelle deux personnes avaient aspergé de peinture orange un bâtiment d’UBS à Genève en novembre 2023. L’UBS avait retiré sa plainte pour dommage à la propriété suite au paiement des frais de nettoyage par les activistes.
  • Dans son verdict, le tribunal demande aux pouvoirs publics de faire preuve de tolérance à l’égard des rassemblements pacifiques non-autorisés afin que la liberté de réunion garantie par la Cour européenne des droits de l’homme ne soit pas vidée de sa substance.
  • Cette décision majeure de la juridiction genevoise fait grandement avancer la jurisprudence climatique en Suisse.

Citation de Prune Jaillet, 43 ans, gérante de café, acquittée :

Je suis très reconnaissante pour ce verdict. C’est ce que je veux pouvoir attendre de notre justice : qu’elle respecte les demandes du peuple concernant la transition énergétique, plutôt que de réprimer les préoccupations citoyennes comme si elles constituaient une menace pour notre démocratie. J’espère que cette décision permettra de montrer que la répression que subissent les activistes climatiques est décalée par rapport au message que nous voulons faire passer.

Citation de Gregory Trolliet, 37 ans, acquitté :

Je suis très heureux du verdict et de voir que la justice va à l’encontre de la décision du procureur. Cela me donne de l’espoir pour tous les activistes climatiques et légitime la désobéissance civile.

# Les faits

Le 20 novembre 2023, Prune Jaillet et Anthony Zufferey avaient aspergé d’orange la façade de l’UBS. Leur intention ? Mettre en évidence que la banque possède une grande part du parc immobilier suisse, sans pour autant rénover suffisamment ces bâtiments, contribuant ainsi à aggraver la catastrophe climatique. Les deux activistes avaient été arrêté·e·s en compagnie de Willy Burri et Gregory Trolliet, deux autres sympathisants de Renovate Switzerland qui distribuaient des flyers pour informer les passant·e·s de l’action en cours. Dans son ordonnance pénale du 20 mars 2024, le ministère public concluait à ce que trois des quatre activistes soient reconnus coupables d’infraction à l’art.10 de la loi sur les manifestations dans le domaine public, le cas d’Anthony Zufferey ayant été transféré au Ministère public du canton du Valais, où il est en attente d’un jugement pour de précédentes actions.

Suite à leur arrestation, les quatre activistes ont été placés en garde-à-vue pendant 28 heures et la police a procédé au prélèvement de leurs données signalétiques. À la réception de l’ordonnance pénale quelques semaines plus tard, tous·te·s ont fait recours.

Citation de Willy Burri, 71 ans, retraité, acquitté :

28 h de garde à vue et les frais en plus effacés par un acquittement. L’acharnement d’un procureur coûte cher à la société.

Un verdict qui protège la liberté de réunion pacifique et remet en question le régime de l’autorisation préalable.

Pour justifier sa décision, le Tribunal de police du canton de Genève se réfère à des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. Il note ainsi que : «la tolérance […] demandée aux pouvoirs publics à l’égard des rassemblements pacifiques “illégaux” doit s’étendre aux cas dans lesquels la manifestation en cause se tient dans un lieu public en l’absence de tout risque pour la sécurité, et si les nuisances causées par les manifestants ne dépassent pas le niveau de perturbation mineure qu’entraîne l’exercice normal du droit à la liberté de réunion pacifique dans un lieu public». Le tribunal précise en outre que cette tolérance «doit également s’étendre aux réunions qui entraînent des perturbations de la vie quotidienne, notamment de la circulation routière.»

Il se réfère également aux critiques de la loi genevoise exprimées explicitement par le Rapporteur général des Nations Unies sur le régime de l’autorisation préalable. En effet, ce dernier a rappelé aux autorités le 9 mars 2012 que «l’exercice des libertés fondamentales ne devrait pas être soumis à l’autorisation préalable des autorités». Selon le tribunal, «si le régime de l’autorisation préalable ne porte pas en soi atteinte à la liberté de réunion pacifique, il reste plus restrictif que celui en œuvre dans la majorité des États du Conseil de l’Europe et va à l’encontre des recommandations des organisations internationales».

Une grande avancée pour la jurisprudence climatique en Suisse

Cette victoire juridique importante confirme le bien fondé des actions de désobéissance civile. Alors que partout dans le monde, y compris en Suisse, la justice tend à réprimer de plus en plus l’activisme climatique, la décision du tribunal de police genevois est encourageante. act now! compte bien s’appuyer dessus pour continuer à sonner l’alarme avec tous les moyens légitimes et pacifiques que cela requiert.

# Les liens